Page:Fromentin - Dominique, 1863.djvu/49

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horloge, au timbre éclatant, dont la sonnerie retentissait jusque dans les chambres hautes. Il était impossible de se soustraire à ce bruit, qui nous réveillait la nuit, en plein sommeil, non plus qu’à la mesure battue bruyamment par le balancier, et quelquefois nous nous surprenions, Dominique et moi, écoutant sans mot dire ce murmure sévère qui, de seconde en seconde, nous entraînait d’un jour dans un autre. Nous assistions au coucher des enfants, dont la toilette de nuit se faisait, par indulgence, au salon, et que leur mère emportait tout enveloppés de blanc, les bras morts de sommeil et les yeux clos. Vers dix heures, on se séparait. Je rentrais alors à Villeneuve, ou bien plus tard, quand les soirées devinrent pluvieuses, les nuits plus sombres, les chemins moins faciles, quelquefois on me gardait aux Trembles pour la nuit. J’avais ma chambre au second étage, à l’angle du pavillon touchant à la tourelle. Dominique l’avait occupée autrefois pendant une grande partie de sa jeunesse. De la fenêtre on découvrait toute la plaine, tout Villeneuve et jusqu’à la haute mer, et j’entendais en m’endormant le bruit du vent dans les arbres et ce ronflement de la mer dont l’enfance de Dominique avait été bercée. Le lendemain, tout recommençait comme la veille,