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174 LIVRE m. LA CITÉ.

Chaque ville attendait son salut de ses dieux. On les invo- quait dans le danger, on leur disait: «Dieux de cette ville, ne faites pas qu'elle soit détruite avec nos maisons et nos foyers.... toi qui iiabites depuis si longtemps notre terre, la trahiras- tu? vous tous, gardiens de nos tours, ne les livrez pas à l'ennemi *. » Aussi était-ce pour s'assurer leur protection que les hommes leur vouaient un culte. Ces dieux étaient avides d'offrandes; on les leur prodiguait, mais à condition qu'ils veilleraient au salut de la ville. N'oublions pas que l'idée d'un culte purement moral, d'une adoration d'esprit, n'est pas très-vieille dans l'humanité. Aux âges anciens, le culte consis- tait k nourrir le dieu, à lui donner tout ce qui flattait ses sens, viandes, gâteaux, vin, parfums, vêtements et bijoux, danses et musique. En retour, on exigeait de lui des bienfaits et des ser- vices. Ainsi, dans Ylliade, Chrysès dit à son dieu : c Depuis longtemps, j'ai brûlé pour toi des taureaux gras; aujourd'hui, exauce mes vœux et lance tes flèches contre mes ennemis. » Ailleurs, les Troyennes invoquent leur déesse, lui offrent un beau vêtement et lui promettent douze génisses, « si elle sauve Ilion'». 11 y a toujours un contrat entre ces dieux et ces hommes; la piété de ceux-ci n'est pas gratuite, et ceux-là ne donnent rien oour rien. Dans Escliylç, les Thébains s'adres- sent à leurs divinités poliades, et leur disent : « Soyez notre défense; nos intérêts soni communs;. si la ville prospère, elle honore sfls dieux. Montrez que vous aimez notre ville; pensez au culte que ce peuple vous rend et souvenez-vous des pom- peux sacrifices qui vous sont offerts*. » Cette pensée est exprimée cent fois par les anciens ; Théognis dit qu'Apollon a sauvé Mégare de l'atteinte des Perses, « afin que sa ville lui offre chaque année de brillantes hécatombes *. >

De là vient qu'une ville ne permettait pas aux étrangers de présenter des offrandes à ses divinités poliades ni môn>e d'en-

��I. Eechyle, Sept chefs, t. 69-73, 105, 109, 139, 168-170.

t. Iliade, I, 37 et suir. ; VI, 93-96.

3. Eachyle, Sept chef*, 76-77, 176-181.

k. TkéognU, éd. WeickeF, t. 7M: éd. Boissoud*, t. TfK

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