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76 LIVRE III. LA CITÉ.

ieri aines et rariaient. Beaucoup étaient persuadés qu'une rrlU ae pouvait jamais être prise tant que ses dieux y résidaient; M elle succombait, c'est qu'ils l'avaient d'abord abandonnée. Lorsque Énée voit les Grecs maîtres de Troie, il s'écrie que les dieux de la ville sont partis, désertant leurs temples et leurs / autels '. Dans Eschyle, le chœur des Thébaines exprime la raêm«  croyance lorsque, à l'approche de l'ennemi, il conjure les dieux de ne pas quitter la ville*.

En vertu de cette opinion il fallait, pour prendre une ville, en faire sortir les dieux. Les Romains employaient pour cela une certaine formule qu'ils avaient dans leurs rituels, et que Macrobe nous a conservée : « Toi, ô très grand, qui as sous ta protection cette cité, je te prie, je t'adore, je te demande en grâce d'abandonner cette ville et ce peuple, de quitter ces temples, ces lieux sacrés, et, t'étant éloigné d'eux, de venir à Rome chez moi et les miens. Que notre ville, nos temples, nos lieux sacrés, te soient plus agréables et plus cbers ; prends-nous sous ta garde. Si tu fais ainsi, je fonderai un temple en ton honneur»». Or les anciens étaient convaincus qu'il y avait des formules tellement efficaces et puissantes que, si on les prononçait exactement et sans y changer un seul mot, le dieu ne pouvait pas résister à la demande des hommes. Le dieu, ainsi appelé, passait donc à l'ennemi, et la ville était prise*.

On trouve en Grèce les mêmes opinions et des usages ana- logues. Encore au temps de Thucydide, lorsqu'on assiégeait une ville, on ne manquait pas d'adresser une invocation à sei

1. Virgile, Enéide, II, 3St :

Exc«ssere omnes adytis arisque nKetis. Di quibns imperinm hoc 8t«t«rat.

t. Eschyle, Sept chefs, 217-220. < Étéocle : On le dit, qaaad im Tille est prias, In dieux l'abandonnent. Le chœur : Veuillent les dieux qui sont ici ne jamais moi uitter, et que je ne voie pas Tbèbes prise d'assaut et livrée aux flammes I »

3. Macrobe, Saturnales, III, 9. Pline, Hùt. nat., XXVIII, 4, 18 : « In oppugn» on'.bus ante ooiniasolitum a Romanis sacerdotibus eTocari deum in cujnstutela id

pidurn esset promittique illi enmdein aut ampliorera apud Romanos caltam. »

4. Sur la puissance des formules ica-fUYst ou saxajiirttt, voy. Platon, Loi», Xi, f. 933 ; Euripide, Suppliantes, 39. Ces formules étaient tellement antiqaea, qa«  bteucoup de mots n'étaient plus compris et n'appartenaient même plu à la langva grco^«; Toyex Hésychius, au mot l«t«U. Les aacieas eroyei«Bt qu'ils pouvaient

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