Page:Gagneur - Trois soeurs rivales.djvu/12

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lant chevalier de Vaudrey, la terreur des tournois. Que vous êtes sotte, avec votre mot distingué ! Distingué, pour vous, c’est être maigre, pâle, allongé, poitrinaire…

— Je gagerais, s’écria Gabrielle, que la réalisation de ton idéal, c’est Joseph Duthiou, une manière d’hercule, à chevelure rougeâtre, fort peu distingué, en vérité, qui se place derrière nous à l’église ; et auquel tu adresses des œillades… pleines… de bienveillance…

Henriette jeta sur sa jeune sœur un regard de haine.

— Petite vipère ! s’écria-t-elle.

Au même instant retentit le fouet d’un postillon, et une voiture lancée comme une flèche entra dans la cour du château.

Après un moment d’agitation, les trois sœurs reprirent leurs places sur le banc.

— Sais-tu, ma petite, dit avec hauteur Henriette en s’adressant à Gabrielle, que si tu te permettais de répéter ce que tu viens de dire tout à l’heure, je m’en plaindrais sérieusement à mon père ?

— Si ce n’est pas vrai, répondit Gabrielle, pourquoi t’en fâcher ? Je n’ai voulu faire qu’une plaisanterie, et la manière dont tu l’interprètes me ferait croire…

— Mademoiselle, reprit vivement Henriette, une pareille plaisanterie est fort inconvenante et nullement de mon goût ; répétée devant d’autres personnes, elle pourrait fort bien me compromettre.

— Chut ! dit Renée, ne nous querellons pas : j’aperçois mon père et M. de Vaudrey.

MARIE GAGNEUR.

(La suite à demain.)