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II


Pendant le trajet que fit M. de Vaudrey pour se rendre du château à la tonnelle où les trois jeunes filles se trouvaient réunies, elles purent s’assurer qu’il n’était ni brun, ni blond, ni grand, ni taillé en hercule ; mais petit, fluet, et de cheveux châtains.

Quand il arriva auprès des demoiselles de Charassin, elles étaient toutes trois profondément appliquées à leurs broderies. N’ayant aucune habitude du monde, elles furent parfaitement gauches, et M. de Vaudrey prit immédiatement sur elles la supériorité que donnent sur les êtres timides l’aplomb et l’aisance des manières.

Sa mise était irréprochable et de la mode la plus récente. Il était, du reste, assez insignifiant. À peine âgé de vingt-six ans, il paraissait en avoir plus de trente, à sa figure déjà fatiguée, à ses cheveux rares, aux rides prématurées qui sillonnaient ses tempes. La dépression du front révélant la faiblesse de l’intelligence ; l’élévation du sommet de la tête, indice d’orgueil ; son apparence chétive et la finesse des pieds et des mains annonçaient le rejeton d’une race noble, mais abâtardie. Il n’avait rien de particulièrement laid ; ses yeux gris, voilés