Page:Gagneur - Trois soeurs rivales.djvu/69

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billet qu’elle ouvrit précipitamment. Ce billet était ainsi conçu :

« Mademoiselle,

» Je sais maintenant que vous m’avez indignement trompé, et que vous allez vous marier avec un autre, mais je vous préviens que ça ne se passera pas comme ça. Vous verrez bientôt qu’on ne se moque pas de moi de cette façon sans que je me venge.

» Au revoir donc,
» JOSEPH DUTHIOU. »

Cette menace souleva dans l’esprit d’Henriette de noirs pressentiments, car elle connaissait le caractère emporté de Joseph. Elle glissa ce billet dans son corsage avec une apparente tranquillité, mais son visage devint aussi pâle que celui de Gabrielle. Elle craignait quelque esclandre de la part de son ancien amant.

Elle ne commença à respirer librement que lorsque la voiture qui l’emportait, elle et son mari, roula paisiblement sur la grande route qui conduisait au domaine de Vaudrey. Une chaise de poste, emmenait en même temps, du côté opposé, M. de Morges et Gabrielle, Gabrielle dont l’abattement révélait l’état désespéré d’un cœur dont toutes les fibres ont été rompues et qui n’a plus de ressort pour la douleur.

Renée resta donc seule avec son père au château de Domblans, un instant auparavant rempli de monde et de bruit, maintenant triste et solitaire. Tandis que M. de Charassin alla recevoir les félicitations de ses voisins sur les brillants mariages de ses filles, la pauvre Renée, repassant dans son esprit les événements qui venaient de s’accomplir, pleura sur la destinée de Gabrielle… Elle pleura aussi son premier amour, auquel elle éleva dès lors un mystérieux autel au fond de son cœur.