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cartahut.

algériens et du 50e de ligne. Un magnifique élan éclate dans les rangs français. Leur chef en tête, nos soldats fondent sur les Russes avec une telle impétuosité, que ceux-ci rompus, culbutés, essayent en vain de se rallier. Ils combattent avec fureur derrière chaque traverse, mais il n’est plus d’obstacle capable d’arrêter l’élan de nos soldats ; Malakoff est à nous.

Aussitôt notre artillerie de terre et de mer lance, sur les Russes débandés, une nuée de projectiles. Alors se déploie de plus en plus la bravoure de nos ennemis, et leur ténacité au feu ; nos boulets frappant les épaulements faisaient de larges trouées au milieu des masses compactes, et de nouveaux soldats accouraient immédiatement pour les combler. Pendant plus d’un quart d’heure, ce feu fit un carnage d’autant plus affreux que les boulets, ricochant de l’épaulement, allaient ensuite traverser les bataillons placés en réserve derrière le bastion.

Malakoff nous livrait la ville que les Russes ne tardaient pas à évacuer, après avoir incendié tout ce que nos boulets n’avaient pas détruit.

En effet, à la nuit, la frégate de garde à l’entrée du port signalait le départ des troupes et de leur général qui abandonnait Sébastopol, conservant l’honneur de sauver son armée après avoir vaillamment combattu jusqu’à la dernière heure.

Les drapeaux alliés flottent sur la ville russe. Nous les saluons avec joie, non sans nous sentir un immense regret pour ceux qui sont tombés, et un immense respect pour ceux qui ont été vaincus ! On plaint les uns, on ne peut qu’admirer les autres.

Tous nos blessés furent embarqués et transportés à Varna et à Constantinople ; c’est dans cette dernière ville que cinq de mes camarades et moi, nous reçumes l’ordre de rallier le Montebello qui ramenait l’amiral Bruat en France.

C’est le dernier souvenir de l’expédition de Crimée ; mais il est