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L’ORIENT.

paraître les côtes dans son ombre, et, quand vint le matin, la Sardaigne sortait évanouie comme un nuage, et nous nous retrouvâmes au milieu de la solitude des flots que n’animait la présence d’aucun navire.

Vers le soir, on passa en vue des îles Lipari, mais trop loin pour distinguer autre chose que d’incertaines taches grises se confondant de loin presque avec le bleu.

À minuit, une ligne de lumière éclata dans l’obscurité. C’était le quai de Messine, s’arrondissant au fond du port. On ne s’y arrêtait que pour le service de la poste. Il fut un instant question de nous y descendre à cause de notre blessure, qui pouvait rendre le voyage d’Égypte pénible ou dangereux. Mais cette idée d’être laissé, comme Philoctète, tout seul dans une île ne nous souriait guère, car nous n’avions pas avec nous les flèches d’Hercule pour qu’Ulysse vînt nous chercher, et nous demandâmes à continuer la route, ce qui nous fut accordé après délibération de la Médecine et de l’Amitié, comme on aurait dit au dix-huitième siècle. Le sac