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L’ORIENT.

bête, garnie d’un ajutage de bois, servait de robinet et dispersait en fine pluie l’eau du Nil sur la poussière de la route.

Des employés en costume du Nizam, redingote noire boutonnant droit, fez amarante écimé en képi et orné d’une longue houppe de soie noire, se dirigeaient à cheval vers leurs ministères respectifs, précédés et suivis de leurs domestiques, et montrant cet air ennuyé qu’ont dans tous les pays du monde les employés se rendant à leur bureau et les enfants allant à l’école.

Plus pressés sans doute d’arriver, des officiers dont la soubreveste rouge, taillée sur un modèle européen, gardait encore par la fantaisie et la richesse des ornements des traces du vieux goût oriental, passaient au galop sur des chevaux de sang magnifiquement harnachés. Au coin de leur housse de velours incarnat se recourbait le croissant avec une, deux ou trois étoiles, selon le grade du cavalier.

Poussant en arabe un cri guttural dont la traduction familière est : « Gare à tes pattes ! »