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LE SAHARA.

premières pages du livre. Il est déjà ancien chez l’auteur, et il explique comment il lui est venu. La saison des pluies avait duré longtemps cette année en Algérie (1848) ; l’artiste fuyait devant l’hiver de Blidah à Alger, d’Alger à Constantine, toujours poursuivi par la tempête. Mélancolique, il se promenait sur les remparts de la ville d’Achmet-Bey, et il songeait au désert. « La route qui y conduit se dessinait sur le Condiat-Aty trempé d’eau, et de temps en temps l’on voyait descendre de longs convois de gens au visage marqué par un éternel coup de soleil, suivis de leurs chameaux chargés de dattes et de produits bizarres ; il me semblait sentir encore, en les approchant, comme un reste de tiédeur apportée dans les plis fangeux de leurs bournous. Un matin donc, nous partîmes en désespéré, passant tant bien que mal les rivières débordées et poussant droit devant nous, vers Bisk’ra. Cinq jours après, le 28 février, j’arrivais à El-Kantara, sur la limite du Tell de Constantine, harassé, transi, traversé jusqu’au cœur, mais bien résolu à ne plus