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L’ORIENT.

végétation : elle expire au sommet des collines pierreuses que nous avons derrière nous, et je voudrais que ce fût pour tout à fait ; car c’est par la nudité que le Sahara reprend sa véritable physionomie : j’en suis venu à souhaiter qu’il n’y ait pas un arbre dans tout le pays que je vais voir. Aussi, ce qui me plaît dans le lieu où nous sommes campés, c’est surtout son aspect stérile. Pour couvrir ces vastes terrains tantôt frileux, tantôt brûlés, il n’y a qu’un peu d’herbe. Cette herbe, petite graminée renouvelée par l’hiver, est courte, rare, et devient grisâtre en se fanant. Elle forme à peine un duvet transparent mêlé de brins cotonneux que l’air agite. On y voit jouer la lumière et vibrer la chaleur comme au-dessus d’un poêle. Aussi loin que la vue peut s’étendre, je n’y découvre pas une seule touffe plus fournie qui dépasse le sabot d’un cheval. La terre a la solidité d’un plancher et se gerce sans être friable. Nos chameaux s’y promènent d’un air découragé, la tête haute, le cou tendu vers un coin plus vert qui se montre assez loin au sud, entre deux mame-