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LA PERSE.

comme une tenture le long du corridor qui mène à la Perse. Il est impossible de rien imaginer de plus beau comme goût, comme dessin et comme harmonie de couleurs. Dans ce genre, il faut l’avouer, les Orientaux sont nos maîtres ; chez eux, jamais de crudité, de discordance, d’effet criard. Ils savent rapprocher les tons en apparence les plus insociables et produire la fraîcheur d’aspect avec des nuances éteintes et comme passées : ils risquent des voisinages de rouges différents, font courir le vert sur le bleu, mêlent le jaune pâle à l’orange, sans qu’il en résulte une fausse note, et préparent si habilement les rencontres que le choc des teintes est insensible. Dans ce magnifique tapis, tout ce que peut fournir la gamme de la palette tinctoriale est employé, mais avec une telle discrétion, une harmonie si sobre, un arrangement si heureux que la couleur générale reste d’une richesse sévère et charme les yeux sans les éblouir. Quel plaisir ce serait, laissant à la porte, dans la niche de marbre, ses babouches de maroquin jaune, de mar-