Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/64

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rançon, ayant été contracté par la volonté de M. de La Bourdonnais sans autorité et avec des prisonniers qui ne pouvaient s’engager, était nul de plein droit et regardé comme non avenu. Une seconde ordonnance établissait un conseil provincial au fort Saint-Georges et nommait d’Espréménil commandant et directeur des ville et fort de Madras.

La Bourdonnais écoutait avec la plus grande attention et un léger tremblement de sa lèvre inférieure trahissait son anxiété. Mais lorsqu’il vit que tous ces décrets émanaient de Pondichéry et non de France, il reprit toute son assurance et eut un rire de défi.

— Vous vous imaginez donc que je vais accepter vos ordres et m’y soumettre ? s’écria-t-il. Sachez que je ne reconnais dans l’Inde l’autorité de qui que ce soit. Je m’en tiens à mon brevet, et aux instructions du ministre qui me laissent maître de mes opérations.

— Vous voulez vous faire redire une fois de plus, répondit d’Espréménil, que toute place conquise tombe sous le pouvoir du gouverneur général ? Vous qui êtes aussi gouverneur d’une colonie française, vous le savez mieux qu’aucun autre.

Aucune réplique concluante ne vint à l’esprit de l’amiral qui, pour sortir d’embarras, se jeta de nouveau dans un accès de fureur, manquant peut-être de sincérité malgré sa violence. Les injures brutales, les jurons populaciers, éclatèrent encore, au milieu du silence sévère de l’assemblée. La Bourdonnais s’enflammait de plus en plus et sa face s’était empourprée.

— Ah ! c’est la guerre que vous voulez ? cria-t-il