Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/109

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

soleil, des vignes enlaçaient leurs festons à des treillages voûtés ; au fond, se découpait la gigantesque silhouette du palais de Rhamsès-Meïamoun, avec ses pylônes démesurés, ses murailles énormes, ses mâts dorés et peints, dont les banderoles flottaient au vent ; plus au nord, les deux colosses qui trônent avec une pose d’éternelle impassibilité, montagne de granit à forme humaine, devant l’entrée de l’Aménophium, s’ébauchaient dans une demi-teinte bleuâtre, masquant à demi le Rhamesséium plus lointain et le tombeau en retrait du grand prêtre, mais laissant entrevoir par un de ses angles le palais de Ménephta.

Plus près de la chaîne libyque, le quartier des Memnonia, habité par les colchytes, les paraschistes et les taricheutes, faisait monter dans l’air bleu les rousses fumées de ses chaudières de natron : car le travail de la mort ne s’arrête jamais, et la vie a beau se répandre tumultueuse, les bandelettes se préparent, les cartonnages se moulent, les cercueils se couvrent d’hiéroglyphes, et quelque cadavre froid, allongé sur le lit funèbre à pieds de lion ou de chacal, attend qu’on lui fasse sa toilette d’éternité.

À l’horizon, mais rapprochées par la transparence de l’air, les montagnes libyques découpaient