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le second rang du collier

fenêtres d’une façon vraiment assez remarquable. Il y avait un violon, un alto et une voix de femme. Je fus chargée de jeter des pence par la fenêtre ; mais, en apercevant les musiciens, je poussai un cri de surprise :

— La famille Lhomme !

Tout le monde se leva et vint près de moi. Il n’y avait pas à s’y tromper. M. et Mme  Lhomme et leur fils Alphonse, notre camarade, venus à Londres, sans doute pour l’Exposition, s’étaient déguisés, dans l’idée de nous faire une farce. Nous étions très contents de les voir et bien amusés de leur invention.

— Le bel ensemble de votre musique vous a trahis ! leur criait mon père du haut de la fenêtre. Assez, maintenant ! Venez déjeuner avec nous.

Mais, imperturbables, ils persistaient à tenir leur rôle, à racler les violons et à chanter.

Nous eûmes vite fait de dégringoler l’escalier pour aller les chercher. Mais alors nous nous arrêtâmes, stupéfaits : malgré cette triple et extraordinaire ressemblance, ces musiciens étaient bien des personnages anglais, et pas du tout la famille Lhomme !…

La société de Londres faisait grand accueil à mon père. Beaucoup d’artistes venaient le visiter. Nous vîmes une fois Thackeray, colossal et superbe. Nous avions lu la Foire aux vanités, ce qui le flatta