Page:Gautier - Les Deux Etoiles.djvu/253

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— Eh bien ? dit Sidney d’un ton où palpitaient à la fois mille interrogations.

— À l’aspect du bouquet de violettes, il a prononcé la phrase convenue.

— Bon. Alors nous allons agir.

— Ce n’est pas tout ; le soir même, un billet écrit dans le chiffre dont lui, vous et moi possédons seuls la clé, a été lancé par une main inconnue dans la chambre d’Edith. Ce billet contenait ces mots : « César est trop souffrant pour se risquer dans cette entreprise, et la remet aux premiers jours du mois prochain, la nuit du quatre au cinq. »

— Encore vingt jours d’attente ! s’écria sir Arthur Sidney ; mais il ne sait donc pas que cet air est mortel, et qu’ici Prométhée n’aurait pas besoin de vautour pour lui ronger le foie ? Mais êtes-vous sûr du billet ? nous marchons environnés de tant de piéges !

— Je l’ai apporté. Vous l’examinerez, dit sir Benedict Arundell en tendant un papier plié en quatre à son ami.

— Adieu. Benedict, dans vingt jours je serai ici, dit Sidney ; je regagne mon bateau sous-marin et vais courir quelques bordées avec la Belle-Jenny. Dans vingt jours, l’Angleterre sera lavée de la tache d’Hudson-Lowe.

Benedict remonta vers le sommet de la falaise, Sidney descendit vers la plage, où le canot à demi émergé l’attendait ; et sur ce roc, redevenu désert, la mer continua à jouer avec l’arbre qu’elle déchiquetait.

Au jour marqué la Belle-Jenny reparut à l’horizon : mais le ciel était sombre et menaçant.