Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/378

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que cela ne pouvait manquer. À quoi mon père répliqua : « Fais le portrait de M. Crapouillet et de Madame son épouse, et tu auras cinq cents francs, sur lesquels je te retiendrai cent francs pour tes mois de nourrice, que tu me dois encore. »

V

HURES DE BOURGEOIS !!!…

Madame Crapouillet n’était pas jolie, mais M. Crapouillet était affreux ; elle avait l’air d’un merlan roulé dans la farine, et il ressemblait à un homard passant du bleu au rouge. Je fis le mari couleur pomme d’amour peu mûre, et la femme d’un gris perle tout à fait mélancolique, dans le genre des peintures d’Overbeck et de Cornélius. Ce teint parut peu les flatter, mais ils furent contents de ma manière de peindre, et ils dirent à l’auteur de mes jours : « Au moins monsieur votre fils étale-t-il bien sa couleur et ne laisse-t-il pas un tas de grumeaux dans son ouvrage. » Il fallut me contenter de ce compliment assez maigre ; pourtant j’avais représenté fort exactement la verrue de M. Crapouillet, et les trous de petite vérole qui criblaient son aimable visage ; on pouvait distinguer dans l’œil de madame la fenêtre d’en face avec ses portants, ses