Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 5 bis.djvu/11

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
VII
DU TROISIÈME SIÈCLE.

Philippe, Arabe de naissance, devenu préfet du prétoire, forma le projet de monter sur le trône, et fit massacrer le jeune Gordien par les soldats. Il fut élevé à l’empire.

À son retour de l’Orient, Philippe célébra les jeux séculaires. Mille ans s’étaient écoulés depuis la fondation de Rome, les tribus du peuple romain avaient disparu, et une république militaire avait succédé à une république populaire qui n’avait vécu que par la guerre. Le monde était vengé ainsi des Romains ; tout se préparait pour la conquête des Barbares et la fin de l’empire.

Depuis le règne d’Auguste jusqu’au temps d’Alexandre-Sévère, dit Gibbon, Rome n’avait eu à redouter que les tyrans et les soldats, ennemis cruels qui déchiraient son sein. Sa prospérité n’était que faiblement intéressée dans les révolutions qui se passaient au-delà du Rhin et de l’Euphrate ; mais lorsque l’anarchie eut confondu tous les ordres de l’état, lorsque la puissance militaire eût anéanti l’autorité du prince, les lois du Sénat et même la discipline des camps, les Barbares de l’Orient et du Nord[1], qui avaient menacé si longtemps les frontières, at-

  1. Il faut lire dans Ammien Marcellin et dans Jornandès la description de ces Barbares ; « C’est là vraiment l’homme barbare. Ses membres trapus, son cou épais et court, je ne sais quoi de hideux qu’il a dans tout le corps, le font ressembler à un monstre à deux pieds ou à ces balustres taillés grossièrement en figure humaine qui soutiennent les rampes des escaliers. Il est tout-à-fait sauvage. Il se passe de feu quand il le faut, même pour préparer sa nourriture. Il mange des racines et des viandes cuites, ou plutôt pourries sous la selle de son cheval. Il n’entre sous un toit que lorsqu’il ne peut faire autrement. Il a horreur des maisons comme si c’étaient des tombeaux. Il va par vaux et par monts, il court devant lui, il sait depuis l’enfance supporter la faim, la soif et le froid. Il porte un gros bonnet de poil sur la tête, un jupon de laine sur le ventre, deux peaux de bouc sur les cuisses, sur le dos un manteau de peaux de rats cousues ensemble. Il ne saurait combattre à pied. Ses jambes, allourdies par de grandes bottes, ne peuvent marcher et le clouent à sa selle, de sorte qu’il ne fait qu’un avec son cheval, lequel est agile et vigoureux, mais petit et laid. Il vit à cheval, il traite à cheval, il achète et vend à cheval, il boit et mange à cheval, il dort et rêve à cheval.

    Il ne laboure point la terre, il ne cultive pas les champs, il ne sait ce