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A tous égards, cette expérience est des plus intéressantes. Elle nous donne d’abord la raison d’être de cette section piriforme que présentent, plus ou moins, tous les tuyaux de plomb romains, façonnés ainsi par pliage[1]. Elle confirme ce qu’on pouvait deviner a priori, à savoir que les fortes pressions parvenaient à les arrondir. Elle montre enfin quelles fortes charges de semblables tuyaux et de semblables soudures pouvaient supporter. Le tube de Belgrand, avec son épaisseur de 6 millimètres seulement, a pu résister à 18 atmosphères ; il est vrai que son diamètre est la moitié de celui de nos tuyaux de Beaunant. Mais l’épaisseur de 35 millimètres que le calcul nous a fait trouver pour ceux-ci, était sûrement, en vertu de cet exemple, capable de résister à la charge de 12 atmosphères et aux coups de bélier qui pouvaient survenir.

Fig. 78.
Fig. 79.

L’attention du constructeur devait se porter tout spécialement sur les joints. Vitruve insiste assez d’ailleurs sur ces « fistularum commissuras[2] » que la pression peut faire éclater. En général, c’étaient des joints à emboîtement comme pour les tuyaux de terre civile[3], une des extrémités de chaque tube étant évasée en forme de cloche (fig. 80), au moyen d’un mandrin qu’on y enfonçait à force ; on faisait pénétrer le bout de l’autre tuyau dans cet épanouis-

  1. Sans doute le mandrinage était aussi plus ou moins soigné suivant l’usage auquel on les destinait. Les tuyaux du musée des Thermes dont il est parlé ci-dessus ont une section presque tout à fait circulaire, ce qui pourrait tenir, il est vrai, autant à la pression intérieure qu’au mandrinage soigné ; mais on y reconnaît le soin spécial à la netteté du bourrelet de soudure. Les tuyaux de siphons devaient être aussi d’une fabrication très surveillée. À ce propos, on peut se demander comment il se fait que la section allongée et le bourrelet extérieur n’aient pas empêché les orifices des réservoirs-siphons d’être circulaires. C’est d’abord qu’on peut bien loger un tuyau ovale dans une capacité cylindrique; le scellement garnit le vide ; ou bien le tuyau, logé dans l’orifice, était circulaire, obtenu soit par moulage, soit par la soudure à l’alliage d’étain et de plomb.
  2. Pass. cité, viii, 6.
  3. Commissuris pyxidatis, ita ut superior intret, calce viva ex oleo laevigatis. (Pline, Hist. nat., XXXI, 31).