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quand on pense que d’après Thucydide[1] il n’y avait pas moins de 9.700 talents (58 millions de francs) d’argent monnayé en réserve à l’Acropole au début de la guerre du Péloponèse, que le chiffre de l’argent en circulation était en proportion, que les objets d’art en argent pur, statues, vases, meubles, bijoux, représentaient en Grèce des richesses prodigieuses, on imagine ce que ces mines pouvaient fournir en fait de plomb. On sait du reste l’usage à profusion que les anciens faisaient de ce dernier métal : indépendamment des conduites d’eau, il servait aux scellements des pierres d’édifices, aux ancres des vaisseaux, à toutes sortes d’objets pour lesquels nous employons aujourd’hui le fer ou la fonte. Et cependant le Laurion en produisait, dit-on, plus encore qu’il n’était nécessaire : il y avait surabondance de métal[2].

L’Espagne était aussi fort riche en plomb. Mais c’est surtout la Bretagne (Angleterre) qui, au dire de Pline, en fournissait un tonnage colossal. Le minerai affleurait à la surface en si grandes masses, qu’une loi avait défendu de l’exploiter au delà d’une certaine limite de production[3]. En Gaule, bien qu’aucune des exploitations, au temps des premiers empereurs, n’eût atteint une importance comparable à celle d’un gîte moyen de Bretagne, il y en avait un très grand nombre[4]. Dans le département de l’Aveyron (Rouergue, ancien pays des Ruthènes), une vingtaine de localités présentent encore des traces d’anciennes galeries qui ont suivi les filons de galène à de grandes profondeurs au-dessous de la surface (jusqu’à 200 mètres). La disposition de ces galeries, les descentes munies d’escaliers qui les rejoignaient d’un niveau à l’autre montrent qu’il y avait là une méthode d’exploitation suivie et rationnelle. Il en est de même dans le Gard : à Blatcouzel notamment, on a trouvé, en faisant des fonçages, tout un immense réseau dont on est même loin de connaître toute l’étendue. Dans les Deux-Sèvres, à Melle, des tas énormes de déblais, provenant d’une exploitation romaine,

  1. Thucydide, II, 13.
  2. V. Ardaillon : Les mines du Laurion dans l’antiquité, ch. VI.
  3. « Nigro plumbo ad fistulas laminasque utimur, laboriosius in Hispania eruto, totasque per Gallias : sed in Britannia summo terrae corio adeo large, ut lex ultro dicatur, ne plus certo modo fiat. » Dans les régions méridionales de l’île on a retrouvé, il n’y a pas très longtemps, une cinquantaine de lingots, dont la plupart portent des noms inscrits : ceux des principaux empereurs, de Néron à Marc-Aurèle, et aussi des noms de personnages inconnus, fonctionnaires impériaux, probablement.
  4. V. Daubrée : Aperçu historique sur l’exploitation des mines métalliques de la Gaule (Revue archéologique, 1881).