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ont formé une colline qu’on appelle la montagne de Saint-Pierre. Même fréquence d’anciens travaux dans la Charente, la Lozère, l’Ariège, l’Hérault, la Savoie, les Hautes-Alpes, l’Ardèche. Plusieurs communes ou hameaux portent encore dans ces pays la dénomination de Largentière ou l’Argentière. Dans le Rhône, précisément à peu de distance de l’aqueduc de La Brévenne, nous avons vu que deux Alliages, Sainte-Foy et Saint-Genis, étaient ainsi désignés. La mine de plomb argentifère qui y était exploitée jadis s’étendait, dit-on, au temps des Romains, sur une vaste étendue. Le plomb des siphons et des canalisations urbaines de Lyon a pu venir en partie de cette mine ; mais en raison de l’énorme quantité qu’ont exigée les siphons, il est probable qu’on a fait appel aussi à la production du reste de la Gaule ou de la Bretagne.

On voit donc que de toute manière, ces nombreux siphons des aqueducs de Lyon, avec leurs conduites en plomb, dont la complication surprend d’abord, n’ont rien de chimérique. C’étaient des ouvrages très réalisables, capables de fonctionner normalement, et non, comme on l’a prétendu quelquefois, des essais téméraires qu’on n’aurait pu mener à bien[1].

Motifs de l’absence de siphons aux aqueducs de Rome. — Puisque ce n’est pas le défaut de métal, non plus que la difficulté insurmontable du travail qui pouvaient interdire une entreprise de ce genre, on pourrait se demander pourquoi les Romains n’ont pas songé à établir des siphons, de préférence aux arcades prolongées des aqueducs de la capitale, entre les monts Albains et les murs de la ville. Etait-ce pour donner à cette œuvre un aspect plus imposant, pour faire un magnifique étalage de force et de grandeur? Il n’est pas probable que ce motif les eût fait renoncer à une autre solution, si elle eût été plus pratique. « On s’habitue trop volontiers, dit avec justesse M. Choisy[2], à regarder les Romains comme un peuple qui, disposant de richesses immenses, n’eut jamais à compter avec les moyens matériels, et put dédaigner sans scrupule les expédients que nous suggère quelquefois

  1. Il a été dit parfois que l’aqueduc du Gier n’avait jamais fonctionné ; aux autres on a nié l’existence des siphons.
  2. L’art de bâtir chez les Romains, Introduction, p. v.