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Selon Pline, l’attaque à la pointe et au marteau aurait été aidée, par l’emploi du feu et du vinaigre[1]. Le feu pouvait bien être un moyen de désagrégation efficace, surtout si son action était suivie d’un courant d’eau froide : la roche, ainsi étonnée, pouvait éclater et se laisser détacher en blocs[2]. La difficulté n’était pas d’amener l’eau dans les galeries, mais d’éviter d’être asphyxié par la vapeur : Pline ne manque pas de le faire remarquer[3]. C’était donc surtout un procédé de plein air et il n’est pas impossible qu’il ait été utilisé pour l’ouverture des tranchées de nos aqueducs dans le gneiss dur où ils sont enclos. L’autre moyen, celui du vinaigre, est d’une authenticité plus douteuse. Son action, en tout cas, ne pourrait être efficace que pour les roches calcaires, et dans quelle mesure ? Pour aider le coin à pénétrer, et celui-ci ayant déterminé une fente, pour agrandir celle-ci par l’effervescence et permettre d’y engager plus facilement les leviers elles pinces ? Il est possible. Mais encore ne serait-ce qu’un bien petit moyen. Ne vaut-il pas mieux classer cela parmi les légendes nombreuses auxquelles Pline, plus encore que Tite-Live, a fait dans son livre un si complaisant accueil ?

Les outils de maçons n’ont guère varié depuis l’époque romaine. Sauf lʼascia[4], qui correspondait à la doloire, mais avec une forme toute spéciale, ils se retrouvent à peu près tous tels quels sur nos chantiers : la truelle (trulla), l’auget (fidelia), le niveau (libella), l’équerre (norma), la règle (regala), le cordeau (linea), le fil à plomb (perpendiculum), la ripe (marra) pour dresser les parements, le ciseau (scalprum) et le compas (circinus).

  1. Hist. nat., xxiii, 27 et xxxiii, 21. « Saxa rumpit infusum quae non ruperit ignis autecedens. »
  2. On retrouve à Las Babias sur les confins des provinces de Léon et des Asturies, des fronts de taille où la roche a été visiblement attaquée par le feu, puis étonnée ; on aperçoit les vestiges de canaux qui amenaient l’eau de plusieurs kilomètres sur ces fronts de taille.
  3. xxxiii, 21
  4. De Boissieu (ouvr. cité, p. 103), en précisant la signification de la formule qui figure sur un grand nombre de tombeaux, sub ascia dedicavit, distingue plusieurs espèces dʼascia : lʼascia, instrument de sarclage, lʼascia, outil pour polir le bois, lʼascia des stucateurs, enfin lʼascia des maçons et tailleurs de pierre, qui est représentée sur les tombeaux. Saint Jérôme assimile lʼascia au λαξευτἠριον des Grecs et la définit dans son commentaire de la Version des Septante : Genus ferramenti quo lapides dolantur.