Page:Ginguené - Lettres sur les Confessions de J. J. Rousseau, 1791.djvu/14

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
(4)

n’ignoroit ni ſes malheurs, ni leur ſource : il ſavoit qu’en ſe confeſſant, Rouſſeau ne pouvoit ſe confeſſer ſeul. L’engager à cette entrepriſe, c’étoit donc lui dire : « Votre jeuneſſe agitée, & ſouvent avilie, ne promettoit point ce que vous êtes : ce contraſte, peint par vous-même, eſt fait pour intéreſſer vivement. Vous avez commis des fautes : vous les avouerez avec franchiſe ; & cet aveu donnera plus de relief & de créance à vos vertus. Vous êtes malheureux, perſécuté, calomnié : vous toucherez par la peinture de vos infortunes : vous tirerez de vos perſécuteurs la vengeance qui vous eſt due : vous confondrez vos calomniateurs. Voilà ce que vouloit dire la ſeule phraſe, Ecrivez vos Mémoires. Je défie que, d’après la poſition où Rouſſeau ſe trouvoit alors, & la connoiſſance qu’avoit Duclos de cette poſition & de ſes cauſes, on puiſſe lui donner un autre ſens.

Mais devoit-il les écrire, comme il a fait ? Ceci peut regarder ou la manière dont il a parlé de lui, ou celle dont il parle des autres.

Rien de plus embarraſſant en général que de parler de foi ; mais la bonne opinion que la plûpart des hommes ont, ou veulent donner d’eux-mêmes, fait qu’en pareil cas, il n’y a pour eux d’embarraſſant que leur modeſtie, ou le deſir de paroître modeſtes. Les Mémoires particuliers ne ſont guères