Page:Ginguené - Lettres sur les Confessions de J. J. Rousseau, 1791.djvu/16

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mais ce qui eſt vil ; & pour une ame auſſi fière ; de combien ces derniers aveux ne ſont-ils pas les plus pénibles ? Non content de ces accuſations, il atténue le bien qu’il pouvoit dire, ou laiſſer croire. Ses admirateurs, ſes enthouſiaſtes, car il en avoit dès-lors, placent en vain ſur ſa tête la couronne de la Vertu ; il ſe l’arrache, & dit & prouve en cent façons qu’il n’eſt point vertueux. Qui dit vertu, dit force & courage ; & il s’avoue foible & timide. Il croit utile qu’un homme regardé comme au-deſſus de la claſſe commune, ſe montre une fois en dedans & à nud. Aucun ne l’a fait encore, il veut donner ce grand exemple : & reprenant cette tâche ſi difficile, à deux époques différentes, il ne varie ni dans ſon plan ni dans ſa courageuſe franchiſe. Il avoit juſqu’alors juſtifié ſa deviſe[1], en diſant aux hommes leurs vérités : il la juſtifie bien autrement, en leur diſant les ſiennes.

Quant à la manière dont il a parlé des autres, il eſt fort aiſé de lui en faire un reproche ; mais il le ſeroit moins peut-être de prouver qu’il en devoit parler autrement. Vous avez vu dans ſa réponſe à Duclos, qu’il ſentoit la difficulté de raconter ſa vie, ſans compromettre perſonne. Près de

  1. Vitam impendere vero.