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AVRÎL. — LES ROMANS 95

EDMOND HARAUCOURT

Dieudonat.

Ce roman se passe dans un pays de légende sur lequel règne le duc Hardouin le Juste, en un temps où la coutume voulait .qu'on vénérât les chefs en dépit de leurs fautes, ce qui le distingue et l'éloigné suffisam- ment du nôtre où la coutume veut qu'on les haïsse en dépit de leurs qualités. La duchesse Mahaut, épouse d' Hardouin, après une longue stérilité, est à la veille de donner le jour à un enfant et toute la population implore le ciel pour que cet enfant soit un fils et que ce lils appelé à régner soit doué de toutes les qualités.

Comme la ferveur de ces prières est immense, Dieu se laisse toucher par elles; « l'enfant se fait garçon puis, jour par jour, pendant les mois de la gestation, chaque sainte et chaque saint, à leur fête annuelle, apportent les vertus qu'ils possédaient en propre : les qualités de l'esprit aussi bien que celles du cœur arrivaient numérotées et se classaient dans le petit bonhomme avant même qu'il fût né ». Il reçut également les avan- tages physiques : santé, force, beauté. Et voilà sans doute de beaux cadeaux à faire à un enfant !

Le diable alors se mit de la partie, et lui aussi il apporta son présent, et ce fut celui-ci : tous les souhaits du prince Dieudonat seront exaucés irrévocablement ! Don magnifique, don terrible et diabolique; combiné avec toutes les grâces et toutes les vertus de Dieudo- nat, il fait fondre sur lui, sur ses proches, sur son peuple, les pires catastrophes, et ce prince intelligent, puissant et beau, finit, après de prodigieuses aventures, cul-de-jatte, aveugle et sourd, mendiant son pain sous le porche d'une cathédrale.

Le lendemain de sa mort, tandis que, tout plein de