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304 LE MOUVEMENT LITTÉRAIRE

de M. Olivier Le Paladin, a respecté la couleur et Tex- traordinaire saveur.

C'est l'histoire de la pauvre petite Nami-Ko, épousée par renseigne de vaisseau Takeo, qui s'en va au loin, la laissant au pouvoir terrible de sa marâtre qui la déteste comme la belle-mère traditionnelle d'Europe, et qui a des moyens plus puissants de lui prouver son aversion. Elle a décidé de faire répudier Nami-Ko et, malgré la résistance de son fils, elle y parvient; elle oblige le père de la jeune femme, le célèbre général Kataoka-ki, à la re- prendre, et Nami-Ko meurt phtisique, inconsolable et dé- sespérée. Takéo, qui l'aimait, vient pleurer sur sa tombe auprès de son père; larmes fugitives, car des Japonais, des soldats, ne doivent pas s'attendrir longtemps :« c'est, par l'épreuve qu'on devient un homme et que le cœur se trempe ». Et les deux hommes, laissant au cimetière l'objet de leur tendresse et de leurs regrets, s'en vont ensemble en devisant : « Il y a bien longtemps que je n'ai eu le plaisir de vous voir. Racontez-moi tout à l'aise ce qui s'est passé à Formose ».

Cette histoire qui comporte, vous le pensez bien, d'autres épisodes : récits de guerre, aventures d'amour et de haine, évocations de décors, est, nous dit l'au- teur, tout à fait véridique : la répudiation de Nami-San, la douleur de Takéo-Kun, l'indignation du général do division Kataoka qui recueillit chez lui sa fille, la cons- truction qu'il fit faire d'un pavillon dans un endroit tranquille de son parc pour y soigner son enfant malade, son excursion à Kyoto et Osaka en compagnie de Nami- San avant l'éternelle séparation, son refus d'accepter les fleurs envoyées par la famille Kawashima pour les funé- railles, tout ce drame s'est déroulé vraiment. « Ce qu'il y a d'insipide dans ce roman, dit Tokutomi Kenjirô, cela tient à mon incapacité, et s'il y a une note qui empoigne le lecteur, eh bien ! cette note, je l'ai recueil- lie de la bouche d'une femme, un soir d'été ». Et certes, il prend là une précaution inutile qui témoigne d'une