Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/15

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de Goethe avec la baronne de Stein, trouva mauvais que le grand poète eût donné son affection à une personne d’un rang si inférieur. La baronne fut outrée, et, malgré tous les efforts de Goethe pour conserver son « amitié, » la rupture fut complète. Néanmoins, il resta dévoué jusqu’à la fin à celle qu’il avait tant aimée, et Fritz de Stein ne cessa pas d’être l’objet de sa vive et paternelle affection.

Goethe acheva vers ce temps-là le drame du Tasse, commencé en 1777, et auquel il avait travaillé en Italie. On ne, manqua pas de faire, au sujet de cette pièce, des rapprochements entre Weimar et Ferrare : Goethe était le Tasse ; Charles-Auguste, Alphonse ; la duchesse Louise, la princesse ; Herder, Antonio ; la baronne de Stein, Ëléouore Sanvilale. Tout cela était plus que hasardé, mais il y a des esprits, et ils sont nombreux, qui cherchent avant tout dans une œuvre poétique des allusions, des réalités, parce qu’ils sont incapables d’y puiser une jouissance pure et désintéressée. Goethe ne laissa jamais paraître pour la duchesse Louise que le respect le plus tendre, et rien ne ressemble moins à la manière dont il fut traité par son généreux ami Charles-Auguste que la conduite d’Alphonse envers l’auteur de la Jérusalem délivrée.

Après son retour de Rome, Goethe ne tarda pas à étudier les ouvrages de Kant, et, dans la Critique du jugement, les chapitres consacrés à l’esthétique fixèrent son attention d’une faç.on toute particulière. Mais ce furent surtout les sciences naturelles et les beauxarts qui lui offrirent une occupation salutaire, dont il avait grand besoin dans la situation peu agréable où il se trouvait alors. Il ne fut pas d’abord également heureux auprès du public dans ces deux directions de sou activité. Ou peut s’étonner aujourd’hui que, sans avoir jamais été capable de rien produire dans les arts qui lut vraiment remarquable, il ait vu le public s’incliner devant ses jugements, et ait été considéré dans ces matières comme un arbitre souverain, et, qu’en revanche, après avoir fait une étude approfondie des sciences naturelles et s’être (’levé dans ce domaine aux conceptions les plus admirables, il ail vu ses travaux, des travaux pleins de génie, accueillis longtemps avec indifférence, avec dédain. Cependant on a fini par reconnaître aussi dans ce nouveau champ son mérite supérieur, et, si nous osons hasarder ici notre opinion personnelle, l’avenir lui rendra peut-être encore une plus complète justice.

Ce ne fut pas seulement par ses travaux particuliers que Goethe contribua au progrès des sciences ; il y concourut puissamment par ses relations avec l’université d’Iéna. On voit dans ses Annales combien celte grande institution l’occupait. Elle dut en grande partie à l’in-