Page:Goethe - Les Affinités électives, Charpentier, 1844.djvu/132

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Au moment où on allait se mettre à table, les charpentiers, précédés par une joyeuse musique, firent leur entrée solennelle dans la cour du château. L’un d’eux prononça une courte harangue et fit circuler une immense couronne de chêne, ornée de mouchoirs et de rubans de soie. Les dames s’empressèrent d’enrichir cette couronne de toutes sortes de dons gracieux qu’elles y attachèrent elles-mêmes. Puis on se mit à table, et les charpentiers, heureux et fiers, continuèrent leur marche à travers le village, où ils enlevèrent aux jeunes filles leurs plus beaux mouchoirs, leurs plus beaux rubans ; et le cortège grossi par la foule des curieux arriva, au milieu des cris de joie, à la maison d’été, dont le toit fut aussitôt orné de la couronne de chêne surchargée d’offrandes de tout genre.

Après le dîner, Charlotte, qui ne voulait ni cortège ni marche régulière, se borna à proposer à ses hôtes une promenade sur la montagne de la maison d’été, où l’on arriva par groupes isolés et sans ordre ; Ottilie, qu’elle avait retenue afin de l’empêcher de jouer un rôle dans cette fête, arriva la dernière sur la plate-forme, circonstance qui causa précisément le mal que Charlotte avait voulu éviter. Les trompettes et les cymbales qui devaient saluer la société, et qui avaient attendu qu’elle fût toute réunie, n’entonnèrent leurs bruyantes fanfares qu’au moment où la jeune fille parut, et ils la proclamèrent ainsi la reine de la fête.

Pour mettre la maison d’été en harmonie avec la solennité de ce jour, on l’avait décorée de guirlandes de fleurs disposées selon les règles architectoniques. Le Baron avait fait placer sur le fronton, des chiffres en fleurs qui indiquaient la date de cette inauguration. Il avait en même temps donné l’ordre de faire figurer le nom