Page:Goldsmith - Le Vicaire.djvu/223

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mystère que la Providence a cru devoir cacher à notre curiosité ; elle se borne à nous assurer des consolations.

« Dans cet état, l’homme implore le secours de la philosophie. Mais le ciel, la voyant impuissante à le consoler, lui offre l’appui de la religion. Les consolations de la philosophie nous amusent ; mais bien souvent elles nous trompent. Elle nous dit, tantôt que cette vie est pleine de délices pour qui sait en jouir, tantôt que le malheur est inévitable ici-bas ; mais que la vie est courte, et que le malheur est de courte durée. Deux consolations qui se détruisent l’une l’autre ; car, si la vie est un lieu de délices, sa brièveté est nécessairement un malheur ; si elle est longue, elle ne fait que prolonger nos douleurs. Ainsi donc, la philosophie nous est d’un faible secours. La religion a des consolations d’un ordre bien plus élevé. L’homme, nous dit-elle, ne fait ici-bas qu’éprouver son âme, que la préparer pour un autre séjour. Quand le juste se dégage des entraves du corps, quand il n’est plus qu’un glorieux esprit, la terre, il le sent bien, c’était déjà pour lui la félicité du ciel. Mais le coupable, qui s’est vautré dans le vice, qui en a contracté les souillures !… ce n’est qu’avec effroi qu’il s’arrache aux liens du corps ; car il s’aperçoit qu’il a anticipé sur la vengeance céleste. C’est donc à la religion que, dans toutes les circonstances de la vie, nous devons demander nos consolations les plus réelles ; car, si déjà nous sommes heureux, c’est un plaisir de penser que nous pouvons rendre ce bonheur éternel ; si nous sommes malheureux, il y a quelque chose de consolant dans l’idée qu’il existe pour nous un lieu de repos. Ainsi, la religion garantit, — aux heureux de ce monde, la continuation de leur bonheur, — aux malheureux, un autre état que la misère.

« Également bienveillante pour tous les hommes, la religion a cependant pour les malheureux des grâces spéciales. C’est au malade, au pauvre nu et sans abri, c’est à l’affligé, au détenu, que notre sainte loi