Page:Goncourt - Germinie Lacerteux, 1889.djvu/188

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tique qu’elle avait été ne se retrouvait et ne revivait plus en elle qu’aux jours où mademoiselle donnait un petit dîner dont le nombre de couverts était toujours assez grand par la bande d’enfants conviés. Ces jours-là, Germinie sortait, comme par enchantement, de sa paresse, de son apathie, et, puisant des forces dans une sorte de fièvre, elle retrouvait, devant le feu de ses fourneaux et les rallonges de la table, toute son activité passée. Et mademoiselle était stupéfaite de la voir, suffisant à tout, seule et ne voulant pas d’aide, faire en quelques heures un dîner pour une dizaine de personnes, le servir, le desservir avec les mains et toute la vive adresse de sa jeunesse.


XL.


— Non… cette fois-ci, non, dit Germinie en se levant du pied du lit de Jupillon où elle s’était assise. Il n’y a pas moyen… Mais tu ne sais donc pas que je n’ai plus un sou… ce qui s’appelle un sou !… Tu n’as donc pas vu les bas que je porte !

Et relevant sa jupe, elle lui montra des bas tout troués et noués avec des lisières. — Je n’ai plus de quoi changer de rien… De l’argent ?… mais le jour de la fête de mademoiselle, je n’ai pas eu seulement pour lui donner des fleurs… Je lui ai acheté un bouquet de violettes d’un sou, ainsi ! Ah !