Page:Goncourt - Germinie Lacerteux, 1889.djvu/250

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elle se mit à écrire quelques lignes de sa grosse écriture.

— Tiens, fit-elle en pliant la lettre, tu vas me faire le plaisir de donner cela à ton amie Adèle pour le faire porter par le portier… Et maintenant, à la paille !

Mais Germinie ne voulut jamais aller se coucher. Ce n’était pas la peine. Elle ne se fatiguerait pas. Elle resterait assise toute la journée. D’ailleurs, le plus fort de son mal était passé ; elle allait déjà mieux. Et puis le lit, pour elle, faisait mourir.

Le médecin, appelé par le mot de mademoiselle, vint le soir. Il examina Germinie et ordonna l’application de l’huile de croton. Les désordres de la poitrine étaient tels qu’il ne pouvait encore rien dire. Il fallait attendre l’effet des remèdes.

Il revint au bout de quelques jours, fit coucher Germinie, l’ausculta longuement. — C’est prodigieux, dit-il à mademoiselle quand il fut redescendu, elle a eu une pleurésie, et ne s’est pas alitée un moment… C’est donc une fille de fer ?… Oh ! l’énergie des femmes !… Quel âge a-t-elle ?

— Quarante-et-un ans.

— Quarante-et-un ans ? Oh ! c’est impossible !… Vous êtes sûre ? Elle en paraît cinquante…

— Ah ! pour paraître, elle paraît tout… Qu’est-ce que vous voulez ? Jamais de santé… toujours à être malade… des chagrins… des misères… et puis un caractère à se tourmenter toujours…

— Quarante-et-un ans ! c’est étonnant ! répéta