Page:Goncourt - Journal, t3, 1888.djvu/315

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pression de la poitrine, avec, au fond de soi, une sorte de tristesse.

Il y aurait un bien curieux, un bien intéressant et un bien nouveau volume, à faire de fragments de récits militaires, intitulé : La Guerre, — où l’on ne serait que le sténographe intelligent de choses contées.

— Dans un sentier, sous de grands noyers, sur une route, au bord de laquelle chantent les sources, les torrents aux filets d’eaux brisés par les pierres, marche devant nous un couple étrange : une espèce de petite naine à la grosse caboche, coiffée d’un bonnet de femme, et habillée d’un camail qui lui tombe à la hauteur des jarrets, une petite fille comme rognée en bas, et ayant au bras un immense panier, et aux pieds des sabots, faisant flic flac dans les ruisselets, filtrant sur le chemin. Elle donne la main à un petit frère hydrocéphale, aux bras attachés plus bas que des bras humains, aux mains traînant presque à terre, et tous deux, en le paysage frais et chantant, détachent la silhouette fantastique d’un couple d’enfants nabots, dans un conte de fée, allant chez l’Ogre, ou chez la grand’mère Loup.

— Les militaires, tout charmants qu’ils peuvent être, sont à la longue un peu insupportables, par une tyrannie des idées et des pensées, une sorte d’habitude du commandement dans la causerie. Ils