Page:Goncourt - Journal, t7, 1894.djvu/326

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Mme Daudet sur le rebord de la loge, ne me voit pas.

Un public de première, comme jamais on n’en a vu à l’Odéon, assure Porel.

La pièce commence. Il y a deux mots, dans le premier tableau, sur lesquels je comptais pour m’éclairer sur la disposition du public. Ces deux mots sont : « une vieille bique, comme moi » et « des bambins, qu’on a torchés ». Ça passe, et je conclus en moi-même que la salle est bien disposée.

Au second tableau, quelques sifflets, et commencement du soulèvement de la pudeur de la salle : « Ça sent la poudre, j’aime ça ! » laisse échapper Porel, sur un ton pas vraiment très amoureux de la poudre.

Daudet sort, pour calmer son fils, qu’il entrevoit prêt à batailler, et revient bientôt avec une figure colère, et accompagné de Léon, disant, que son père avait une tête si mauvaise dans les corridors, qu’il a craint qu’il se fît une affaire, et je regarde, vraiment touché au fond du cœur, le père et le fils, se prêchant réciproquement la modération, — et tout aussi furieux, l’un que l’autre, en dedans.

La lutte entre les siffleurs et les applaudisseurs parmi lesquels on remarque les ministres et leurs femmes, continue aux tableaux du bal de la « Boule-Noire » au tableau de la « Ganterie de Jupillon ».

Enfin arrive le tableau du dîner des petites filles. Là, je l’avoue, je me croyais sauvé. Mais les sifflets redoublent. On ne veut pas entendre le récit de Mme Crosnier. On crie : Au dodo les enfants ! et j’ai, un quart d’heure, l’anxiété douloureuse de croire qu’on