Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/273

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bout de l’abaissement et de la diminution de sa personnalité et elle n’était plus, selon la comparaison d’un habile manieur d’âmes, que la « languette de la balance », l’instrument docile et obéissant sous le poids de tout ce qu’on lui fait porter.

Ce qui lui manquait et lui faisait défaut, c’était une absence d’aliment à des appétits nouveaux, et tout à coup irrités en elle : un goût lui était venu, un désir de rigueur, d’âpreté, de sévérité, de pénitences rudes. Le confesseur di manica larga, à l’absolution coulante et facile, suffisant pour la routinière dévotion traditionnelle du pays, ne lui suffisait pas. Il lui fallait, à elle, le prêtre qui en demande trop. Avec sa nature, ses secrètes chaleurs d’amour, si peu dépensées dans sa vie, cette femme de sentiments extrêmes avait vu en imagination, dans la religion, un dur sacrifice, un martyre en détail, une grande occasion d’héroïsme contre elle-même. Elle ambitionnait d’y trouver la privation, l’immolation, une sorte de sainte torture journalière. Elle avait souvent à