Page:Gorki - La Mère, 1945.djvu/292

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— C’est ici ! dit la fillette. Vous avez choisi un mauvais logis… Il est bien pauvre, ce paysan !…

À tâtons, elle chercha la porte, l’ouvrit, et cria d’une voix alerte :

— Tatiana, voilà ta pensionnaire !

Puis elle s’enfuit. Sa voix résonna encore dans l’obscurité :

— Adieu !


XVI


La mère s’arrêta sur le seuil et regarda en s’abritant les yeux de la main. La chaumière était petite et étroite, mais d’une propreté qu’on remarquait immédiatement. Une jeune femme sortit de derrière le poêle, salua en silence et disparut. Dans un angle, une lampe allumée était placée sur une table. Le maître de la maison était assis là et tambourinait sur le bord de la table ; il regardait fixement la mère.

— Entrez ! lui dit-il au bout d’un instant… Tatiana, va donc appeler Pierre, vite !

La femme sortit rapidement, sans même jeter un coup d’œil sur la mère. S’étant assise sur un banc en face du paysan, celle-ci promena son regard autour d’elle. Sa valise n’était pas visible. Un silence lourd remplissait la chaumière ; seule, la lampe faisait entendre un léger crépitement. Le visage soucieux et renfrogné de l’homme vacillait en traits mal définis.

— Eh bien, parle donc… Dépêche-toi…

— Et où est ma valise ? demanda soudain Pélaguée, d’une voix forte et sévère, sans se rendre compte de ce qu’elle faisait.

Le paysan haussa les épaules ; il répondit pensivement :

— Elle n’est pas perdue !

Et il ajouta d’un air morne en baissant la voix :

— C’est à dessein que j’ai dit qu’elle était vide devant la petite… Ce n’est pas vrai ! Elle contient des choses très lourdes…

— Eh bien ? demanda la mère.

Il se leva, s’approcha d’elle, se pencha et demanda à voix basse :