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LA SOCIÉTÉ MOURANTE

aura ruiné quelques centaines de familles pour s’enrichir de leurs dépouilles.

Vous punissez le criminel qui, pour satisfaire ses goûts de paresse et de débauche, aura suriné une victime quelconque ; mais cette paresse, ce goût de la débauche qui les lui a inculqués, si ce n’est encore votre société ? Vous le punissez lui qui opère en petit, mais vous entretenez des armées pour les envoyer, outre-mer, opérer en grand contre des peuples incapables de se défendre. Mais les exploiteurs qui tuent non pas seulement un, dix individus, mais usent des générations entières en les brisant de travail, en leur rognant tous les jours leurs salaires, les acculant à la misère la plus sordide, oh ! à ceux-là vous leur réservez vos sympathies, vous savez mettre, au besoin, toutes les forces de votre société à leur service. Et la loi, dont vous êtes les gardiens farouches, lorsque leurs exploités, las de souffrir, relèvent la tête et réclament un peu plus de pain, un peu moins de travail, vous en faites l’humble servante des privilégiés, contre les réclamations intempestives des va-nu-pieds.

Vous punissez l’imbécile qui se laisse prendre à vos filets, mais le roublard assez fort pour en rompre les mailles, vous le laissez filer en paix. Vous emprisonnez le trimardeur qui aura volé une pomme en passant, mais vous mettez au service du propriétaire tous les rouages de votre procédure pour lui permettre de voler au pauvre diable qui lui