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ET L’ANARCHIE

gent de semaine, le lendemain, revue de l’officier de section, revue de capitaine, du commandant, du colonel, cela n’en finit plus.

À chacune de ces revues, il faut que vous installiez votre fourbi sur votre lit : D’abord un mouchoir — qui est religieusement conservé pour ces occasions — que vous étendez délicatement sur votre lit ; sur ce mouchoir, il faut installer vos brosses, vos godillots de rechange, votre caleçon — que l’on ne sort guère également que ces jours-là — une chemise roulée d’une certaine façon et d’une certaine longueur, votre bonnet de nuit, votre boîte à graisse, votre fiole à tripoli, un étui à aiguilles, du fil et des ciseaux.

Pour que cette installation soit faite dans les règles, des pancartes illustrées sont placardées dans les chambrées, qu’il faut consulter à chaque instant pour bien savoir la place de la brosse à patience, de la fiole à tripoli ou de tout autre objet aussi important ; car il faut avoir grand soin de bien mettre chaque objet à sa place, sinon vous ne tarderiez pas à entendre éclater à vos oreilles une tempête d’imprécations vomies par celui de vos chefs qui s’apercevrait de l’irrégularité ; sachez que la peine de mort ne serait pas trop forte pour expier une semblable négligence. Horreur ! abomination de la désolation ! une fiole de tripoli à la place d’une boîte à graisse, ce serait la ruine de la France si le général venait à s’en apercevoir.