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ET L’ANARCHIE

moins longue, selon le degré de résistance qu’elle possédera.


Il en est de même dans nos sociétés. L’organisation sociale, les institutions créées pour défendre cette organisation représentent les barrières qui s’opposent au progrès. Tout, dans la société, tend, au contraire, à renverser ces barrières. Les idées se modifient, les mœurs se transforment, sapant peu à peu le respect des institutions anciennes qui se maintiennent et veulent continuer à diriger la société et les individus. Le lent travail de dissociation est, parfois, imperceptible à une génération. On voit bien disparaître des coutumes, s’affaisser un préjugé ; mais ces disparitions ont été amenées si lentement, qu’elles s’opèrent sans que personne en ait conscience ; il n’y a que les vieillards qui, en comparant les habitudes de leur jeunesse avec les habitudes de la jeunesse qui les a remplacés, constatent que les mœurs ont changé.

Mais si les mœurs ont changé, les institutions, l’organisation sociale sont restées les mêmes ; elles continuent à opposer leurs digues aux flots qui les attaquent et viennent, impuissants, se briser à leurs pieds, se contentant d’enlever une pierre par-ci, par-là. Les flots, dans leur rage, peuvent en arracher des milliers. Qu’est-ce qu’une pierre, par rapport à leur masse imposante ? Ce n’est rien ; seulement, cette pierre, les flots la roulent avec eux,