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LA SOCIÉTÉ MOURANTE

Tant que cet idéal ne sera pas réalisé, tant que ce but ne sera pas atteint, vos sociétés ne seront que des organisations arbitraires, contre lesquelles les individus qui se sentent lésés auront le droit de se révolter.

Si l’homme pouvait vivre isolé, s’il pouvait retourner à l’état de nature, il n’y aurait pas à discuter comment on vivra : on vivrait comme chacun l’entendrait. La terre est assez grande pour loger tout le monde ; mais la terre, livrée à elle-même, fournirait-elle assez de vivres pour tous ? Cela est moins assuré ; ce serait probablement la guerre féroce entre individus, la « lutte pour l’existence » des premiers âges, dans toute sa fureur. Ce serait le cycle de l’évolution déjà parcouru à recommencer, les plus forts opprimant les plus faibles, jusqu’à ce qu’ils soient remplacés par les plus intrigants, que la valeur-argent remplace la valeur-force.

Si nous avons dû traverser toute cette période de sang, de misère et d’exploitation qui s’appelle l’histoire de l’Humanité, c’est que l’homme a été égoïste dans le sens absolu du mot, sans aucun correctif, sans aucun adoucissement. Il n’a vu, dès le début de son association, que la satisfaction de la jouissance immédiate. Quand il a pu asservir le plus faible, il l’a fait, sans aucun scrupule, ne voyant que la somme de travail qu’il en tirait, sans réfléchir que la nécessité de le surveiller, les révoltes qu’il aurait à