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ET L’ANARCHIE

notre critique et avons supposé que chacun agissait correctement et logiquement. Mais, si nous faisons entrer en ligne de compte les intrigues, les tripotages, les calculs ambitieux, si nous faisons remarquer, qu’avant d’être définitives, les lois doivent passer devant une autre assemblée : le Sénat qui, lui, est nommé par une autre catégorie d’électeurs, si nous tenons compte que le pouvoir législatif se compose de cinq cents et quelques députés et que chaque électeur n’en nomme qu’un, que sa volonté, par conséquent, entre pour moins d’un cinq centième dans la volonté générale, réduite encore par le veto du Sénat, nous finirons par nous apercevoir que la souveraineté individuelle est en quantité si infinitésimale dans la souveraineté nationale que l’on finit par ne pas la retrouver au décantage.

Mais ce n’est rien encore ; le suffrage universel a un effet encore bien plus désastreux. C’est de donner naissance au règne des nullités et des médiocrités, et nous le prouvons.

Toute idée nouvelle, en avance sur son époque, est toujours, par ce fait, en minorité à ses débuts. Très clairsemés sont les cerveaux assez ouverts pour l’adopter et la défendre. Cela est une vérité reconnue, et la conclusion est, que les individus aux idées vraiment larges, vraiment intelligents, sont toujours en minorité. Le gros de la masse professe les idées moyennes qui ont cours, c’est elle qui fait la majorité, c’est elle qui choisira le député qui,

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