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152 PETITS POÈMES


« Ce généreux tourment dont l’amour seul est cause ;

Ces pleurs versés sans bruit sur le pays natal ;

Cet effroi du péril où l’on croit qu’il s’expose ;


« Ce désespoir secret, qu’ignore un cœur banal,

Pour la patrie en deuil et ses grandeurs déçues ;

Cette foi dans le bien quand triomphe le mal ;


« Toutes ces douleurs-là ne sont jamais perdues.

Un ange les recueille et Dieu sait les bénir :

C’est la rédemption des nations déchues ;


« Et quand vient l’heure où Dieu songe aies rajeunir.

Comme dans un trésor c’est là que sa main puise

Pour doter l’univers d’un nouvel avenir.


« Mais il faut qu’à tes j-eux la vérité reluise :

Ami, lève la tête et renais à l’espoir.

Ta patrie à l’erreur est loin d’être conquise ;


« Ton peuple n’en est pas où tu crains de le voir ;

A mes regards plus sûrs sa chute est moins profonde :

Il peut sembler parfois déserter son devoir ;


« Parfois, comme un soldat que sa blessure inonde,

Sur l’arène sanglante il s’assied à l’écart.

Mais il ne peut périr, sa vie importe au monde.