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Page:Guillaumin - La Vie d’un simple, 1904.djvu/290

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s’en vint couper les sept têtes du monstre qu’il porta au Roi, se donnant comme l’exterminateur. Le Roi lui fit rendre de grands honneurs et enjoignit à sa fille de fixer la date du mariage. Mais celle-ci, qui n’avait pas confiance au méchant bûcheron, trouva moyen, sous des prétextes divers, d’ajourner la cérémonie. Elle dut pourtant finir par choisir un jour, car son père se fâchait. Ce jour-là même, au moment où se formait le cortège, le bon jeune homme revint de son village. En pénétrant dans la capitale, il fut étonné de voir qu’il y avait dans toutes les rues des arcs de verdure et des guirlandes de papier, et qu’à toutes les fenêtres claquaient au vent drapeaux et banderoles. Il demanda à l’occasion de quel heureux événement la ville était en fête, et on lui répondit que c’était en l’honneur du mariage de la fille du roi avec le meurtrier de la Bête à sept têtes. Alors il courut jusqu’au palais, put s’approcher du Roi et de sa fille, auprès desquels était le bûcheron :

« — Cet homme est un menteur, fit-il en le désignant, c’est moi qui ai tué la Bête à sept têtes.

« Le bûcheron le prit de haut, rappelant qu’il avait apporté les sept têtes, et le Roi menaça de faire pendre le bon jeune homme. Mais lui, sans s’émouvoir :

« — Il a pu, sire, vous apporter les têtes, mais non les langues, car les langues, les voici…

« Et il tira de sa poche, où elles étaient pliées dans un mouchoir, les sept langues de la Bête. Le Roi envoya chercher les têtes et put s’assurer qu’elles n’avaient plus de langues, et que celles qu’il avait devant lui étaient bien les vraies langues. Alors il fit pendre le méchant bûcheron et donna sa fille au bon jeune homme. »

Francis était tout oreilles ; après celui-là il en vou-