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Page:Guillaumin - La Vie d’un simple, 1904.djvu/291

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lait un autre, et il me fallait chaque fois épuiser mon répertoire. Les monstres, les diables, les fées, défilaient à la douzaine, et défilaient aussi des rois et des princesses de rêve, des princesses qui avaient de belles robes couleur d’argent, couleur d’or et couleur d’azur, et qui n’en devenaient pas moins gardeuses de dindons ; comme contraste, il y avait des bergers doués de dons surnaturels qui abattaient en une nuit des forêts entières et construisaient le lendemain des palais magnifiques, ce qui leur valait de devenir princes.

Quand j’avais fini, le petit me demandait des explications que je trouvais plutôt embarrassantes ; il avait l’air de croire que tout cela était arrivé, et il voulait savoir le « pourquoi » et le « comment » de chaque épisode. J’en vins à penser qu’il était peut-être mauvais de lui raconter ces blagues auxquelles il semblait attacher plus d’importance qu’il n’eût fallu. J’aimais autant qu’il prît goût aux devinettes.

— Voyons, petit, qu’est-ce qu’on jette blanc et qui retombe jaune ?

Il réfléchissait :

— Peux pas trouver, grand-père…

— C’est un œuf, gros bête !

— Ah ! oui… Demande-moi autre chose, dis.

— Je veux bien… Lattotétrouya, qu’est-ce que ça veut dire ?

Il ne trouvait pas encore, et j’étais obligé de lui expliquer en décomposant :

— Latte ôtée, trou il y a… Ôte une des lattes de l’entrousse, ça fera bien un trou… Autre chose : Qu’est-ce qui marche sans faire ombre ?

Il se rappelait, ayant déjà entendu dire.

— Le son des cloches, grand-père.

— Qu’est-ce qui fait chaque matin le tour de la