Aller au contenu

Page:Guillaumin - La Vie d’un simple, 1904.djvu/314

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

même histoire. Les opposants, ceux qui n’ont pas la responsabilité du pouvoir, se disent capables de faire monts et merveilles, et, lorsqu’ils sont les maîtres, ils s’empressent d’imiter leurs devanciers. Que les socialistes arrivent à avoir la majorité à la Chambre, vous verrez s’ils n’abandonnent pas aussitôt les trois quarts de leur programme. Alors surgiront de plus socialistes qu’eux qui chercheront à les dégommer : c’est dans l’ordre. Oh ! la politique !

Plusieurs sourirent et approuvèrent d’un signe de tête la diatribe de ce désabusé. Mais un commerçant, ami du député sortant, M. Gouget, répondit :

— Il faut que la politique vienne en aide à la science par des réformes sages. Croyez-vous que ce n’est pas à la République que nous devons les écoles et la diminution du temps de service. S’il y avait une majorité de bons républicains comme M. Gouget, nous aurions bientôt l’impôt progressif qui diminuerait les charges des contribuables pauvres ; nous aurions une caisse de Retraites pour assurer le nécessaire aux vieux travailleurs ; les hommes noirs, les femmes en cornettes n’auraient plus le droit d’abêtir l’enfance dans leurs écoles que les gros propriétaires pourvoient d’élèves. (Demandez aux métayers s’ils ont le droit d’envoyer leurs enfants aux écoles laïques.) Enfin, l’État romprait toute relation avec l’Église ; les curés cesseraient d’être des fonctionnaires : ceux qui se servent d’eux les paieraient. Ce programme a été de tout temps celui de tous les vrais républicains : il est celui de M. Gouget qui l’a toujours soutenu de ses votes ; malheureusement, la majorité est restée jusqu’ici hostile à ces principes. Et beaucoup d’électeurs, qui ne comprennent rien, retirent leur confiance à M. Gouget sous prétexte qu’il est incapable de faire aboutir les réformes qu’il prône. Comme s’il était seul !