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Page:Guillaumin - La Vie d’un simple, 1904.djvu/316

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On parle de la mise en commun de tout qui ne serait sans doute pas bien plus commode, car pour que la société basée sur ce principe soit vraiment belle et bonne, il faudrait que les hommes soient individuellement meilleurs qu’ils ne sont, presque parfaits, ce qui n’est pas près d’arriver. Mais on parle aussi de la commune propriétaire de ses terrains et cela me semble être d’une réalisation plus aisée, et cela me semble souhaitable. En tout cas, ce qui se passe à présent est bien révoltant, il faut en convenir. Vous trouvez ça juste de voir le même individu posséder une commune entière alors que tant d’autres ont peine à tirer d’un travail mercenaire leur pain de chaque jour ? Vous trouvez qu’il est naturel de voir des vieillards mourir de faim et de misère, pendant que les oisifs fêtards gaspillent l’argent de façon inouïe, dépensent, dit-on, en une soirée de quoi nourrir plusieurs familles pauvres pendant toute une année ?…

Tant qu’à votre objection, continuai-je en me tournant vers le père Daumier, permettez-moi de vous dire qu’elle est joliment bête. Défunt ma grand’mère se rappelait du temps où les curés passaient dans les champs pour prendre la dîme, où les seigneurs avaient toute sorte de privilèges et de droits exorbitants. À ce moment, il se trouvait sans doute des gens pour prétendre que ces choses-là, ayant toujours existé, ne se pouvaient supprimer. On les a supprimées pourtant ; et maintenant, il ne nous semble pas qu’elles aient pu exister. Il se peut qu’un bon nombre de coutumes et de lois du jour soient appelées à disparaître avant qu’il soit longtemps. Et nos descendants s’étonneront peut-être qu’on les ait conservées jusqu’ici. Pour parler de ce qui nous touche de près, pensez-vous que les choses en iraient plus mal s’il n’y avait plus de fermiers généraux, si chaque exploitant était fermier