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Page:Guillaumin - La Vie d’un simple, 1904.djvu/321

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LVIII


Il y a déjà cinq ans passés que je suis revenu avec mes enfants. Ils ne me sont pas mauvais. Rosalie même a pour moi des tendresses qui m’étonnent. Madeleine est toute dévouée, toute aimante et laisse gouverner sa belle-sœur. L’harmonie règne dans la maisonnée et j’en suis bien aise. Malgré cela, une séparation prochaine est imminente ; ils vont être trop nombreux pour rester ensemble.

C’est qu’il y a un troisième ménage. Mon filleul, le fils de Jean et de Rosalie, rentré du régiment depuis trois ans, s’est marié à la Saint-Martin dernière. J’ai une petite bru : j’aurai bientôt, je pense, un arrière-petit-fils. Et Charles a deux filles qui sont bonnes à marier aussi. Il devient urgent que mes deux garçons aient chacun leur ferme. Daranthon, qui tient à eux, a promis d’ailleurs de placer le sortant dans un autre de ses domaines.

Moi, je suis le vieux !

Je rends des petits services aux uns et aux autres. Les brus me disent :

— Mon père, si ça ne vous ennuyait pas, vous devriez bien…

Et, pour les contenter, j’alimente de bois la cuisine, je donne à manger aux lapins, je surveille les oies.

En été, mes garçons aussi me prient souvent de faire une chose ou l’autre, surtout les jours où le temps presse. Et je conduis aux champs les vaches ou les moutons, je garde même les cochons tout comme il y