Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, 1823.djvu/345

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’égard du saint, les principaux du palais répondirent d’une voix unanime que, si le roi lui accordait la vie, il devait lui ordonner de rester au monastère de Luxeuil. Il confirma aussitôt ce décret. Quelques évêques et prêtres y consentirent pour mettre sur-le-champ Léger à l’abri de la colère du roi. Car celui-ci, séduit par de mauvais conseils, avait ordonné qu’on le lui amenât de Luxeuil, afin de le faire déposer avec insulte au gré de ses accusateurs, et de le mettre à mort, comme ils auraient voulu, ainsi qu’Hérode avait permis aux Juifs de faire de Saint-Pierre. Là, se trouvait présent Herménaire, abbé de la basilique de Saint-Symphorien, à qui, après le départ du saint homme Léger, le roi avait, sur la demande du peuple, remis l’administration de la ville d’Autun. Herménaire se jeta aux pieds du roi, et le supplia avec des prières instantes de permettre que l’évêque demeurât à Luxeuil, et ne fût pas amené en sa présence, selon l’attente des cruels dont le diable avait animé contre lui la fureur. Par ses instances, il le sauva ainsi de la mort, et c’est bien à tort que quelques-uns croyaient qu’Herménaire fréquentait le palais du roi, pour se porter en tête des accusateurs de Léger et s’assurer la possession de son évêché. Il en fut bien autrement ; mais les yeux de la chair ne savent pas discerner une affection spirituelle. Du reste, il ne manque pas de preuves de la conduite d’Herménaire ; car tant que Léger fut en vie, il fournit, avec une pieuse charité et autant qu’il pouvait, à tous ses besoins.

Dans ce même temps, Ébroin résidait en exil au monastère de Luxeuil, tonsuré et portant l’habit de moine ; il avait soin de feindre la concorde avec