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GENÈSE DE L’IDÉE DE TEMPS

puissances que nous renfermons en nous-mêmes, et jusqu’où peut aller en son développement cette activité qui s’agite en nous ; et d’autre part, quel est le secret de cette nature muette qui nous enveloppe ? Voilà les deux inconnaissables auxquels se ramènent, croyons-nous, tous les autres, y compris le temps.

Nous avons vu que la mémoire est le sentiment du même opposé à l’idée du différent et du contraire, or, selon les physiologistes, ce qui produit la sympathie, c’est de découvrir une ressemblance, une harmonie entre nous et autrui ; nous nous retrouvons dans autrui par la sympathie ; de même nous nous retrouvons dans le passé parla mémoire[1]. La mémoire et la sympathie ont donc au fond la même origine.

Ajoutons que la mémoire produit, elle aussi, l’attachement aux objets qui provoquent le mieux ce sentiment du même et nous font mieux revivre à nos propres yeux. Des liens secrets nous rattachent par le plus profond de notre être à une foule de choses qui nous entourent, qui semblent insignifiantes à tout

  1. Nous remarquons la même idée éloquemment exprimée dans la Psychologie de M. Rabier.