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LES ILLUSIONS DU TEMPS

lontairement de les rendre égaux à cette vitesse normale de notre représentation, tout au moins à les en rapprocher. C’est une des raisons qui expliquent que nous raccourcissons les battements plus lents que trois quarts de seconde, et que nous rallongeons les battements plus courts. Là encore, c’est une raison de désir et de bien-être qui domine notre représentation du temps. Mais il y a un fait plus curieux encore, que Wundt remarque. C’est que ce même chiffre de 3/4 de seconde est aussi celui qu’emploie la jambe pour faire un pas dans une marche rapide. C’est donc, au fond, ajouterons-nous, à la durée du pas dans l’espace que nous mesurons le temps. Il est probable que c’est le pas qui a été notre première mesure pour l’espace et, par cela même, pour le temps. A l’origine, la forme la plus générale du temps était la série d’images que l’on a quand on fait une série de mouvements de locomotion, une série de pas. On voit alors les objets se déplacer à droite et à gauche, et si on revient en arrière, on les retrouve. Les trois dimensions de l’espace et la dimension unique du temps s’organisent ainsi d’elles-mêmes dans l’imagination. Aujourd’hui encore nous rythmons sur notre pas la vitesse de notre représentation, et, par une tendance naturelle,