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faculté plus diverse, mobile, empressée, pratique, qui ne s’est guère développée que depuis trois siècles, qui, des correspondances des savants, où elle se trouvait à la gêne, a passé vite dans les journaux, les a multipliés sans relâche, et est devenue, grâce à l’imprimerie, dont elle est une conséquence, l’un des plus actifs instruments modernes. Il est arrivé qu’il y a eu pour les ouvrages de l’esprit une critique alerte, quotidienne, publique, toujours présente, à laquelle les plus puissants en littérature ne purent se soustraire. Le génie critique, dans tout ce qu’il a de mobile, de libre et de divers, y a grandi et s’est révélé ; il s’est mis en campagne pour son compte, comme un audacieux partisan ; tous les hasards et les inégalités du métier lui ont souri, les bigarrures et les fatigues du chemin l’ont flatté ; toujours en haleine, aux écoutes, faisant de fausses pointes et revenant sur sa trace, sans système autre que son instinct et l’expérience, il a fait la guerre au jour le jour, selon le pays, la guerre à l’œil, ainsi que s’exprime l’auteur lui-même des Nouvelles de la République des Lettres.

Bayle est la personnification de ce génie critique ; il le représente à un degré merveilleux dans sa pureté et son plein, dans son empressement discursif, dans sa curiosité affamée, dans sa sagacité pénétrante, dans sa versatilité perpétuelle et son appropriation à chaque chose.